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Réflexions d'une sage-femme du monde : 20 ans de vie associative

Réflexions d'une sage-femme du monde
(chronique de 20 ans de vie associative)
Questions de Joëlle Le Goff, sage-femme




Jeannette Bessonart

J.L.G. -  A l'occasion des 20 ans de l'association dont je suis actuellement la présidente, il m'a semblé important de poser quelques questions à P.J. Bessonart qui en a été la créatrice et qui en est, depuis 'de longues années, l'animatrice. »

J.L.G. : Quelle a été l'idée qui t'a fait créer SAGES-FEMMES DU MONDE EN 1975 ?

P.J.B. : Il ne faut pas oublier que 1975/ 1980 ce sont les années où existaient plus que maintenant, cette attitude d'ouverture, de recherche, de convivialité pour faire des choses ensemble. Mes études de sage-femme ne m'avaient pas permis de vivre cette solidarité. C'est donc, tout naturellement et grâce à un tempéramment personnel d'ouverture aux relations humaines que j'ai rencontré, des sages-femmes de plusieurs pays du monde.
     Donc, la création de SAGES-FEMMES DU MONDE n'était pas prévue. Elle s'est faite tout naturellement. Nous nous sommes rencontrées pour parler de la naissance et du métier. Nous avons voulu nous revoir et nous sommes arrivées jusqu'en Mai 1995. Nous avons prouvé que la sage-femme n'était pas en voie de disparition

1 voir le lien :https://chezjeannette.blog4ever.com/blog/lirarticle-65637-586646.html).

J.L.G. : Tu dis, nous sommes arrivées jusqu'en 1995. Est-ce que toutes celles de 1975 sont arrivées jusqu'en 1995 et que s'est-il passé, dans tout ce temps, que tu n'as jamais dit?

P .J.B. : Non, toutes celles de 1975 ne sont pas arrivées en 1995. Je voudrais tout d'abord parler de choses dont je n'ai jamais parlé. C'est l'occasion de faire un bilan avec un optimisme mesuré. Pendant toutes ces années, la majorité des sages-femmes étaient des françaises.
     Dans tout ce temps, il y a eu, comme dans toute association bénévole, les abandons, les départs volontaires, les fausses propositions d'aide, les absences, les intrigues, les reproches (tel celui de prendre le pouvoir), faits surtout quand personne ne fait rien et quand on s'imagine qu'être dans une association c'est avoir du pouvoir, demander des comptes et parader.
     Je dois dire que c'est parmi les membres de ma profession, que j'ai rencontré les personnes les plus virulentes, pour ne pas dire malhonnêtes. Est-ce une question de jalousie ou de manque d'affirmation de soi? Comme si ces sages- femmes, n'ayant pas réglé leurs problèmes personnels venaient faire leur psychanalyse dans l'association. Toutes les personnes qui vivent vraiment la vie associative savent réellement ce que je veux dire.
      Il y a eu aussi les collègues présentes de temps à temps, conférencières le temps d'un congrès, à l'égo démesuré et qui ont fait preuve, quand à leur prise en charge financière, d'exigences pires que les plus grands orateurs alors que nous leur rendons service en faisant connaître leurs travaux!
     Celles qui s'attribuent la gestion de l'association alors qu'elles n'y font rien.
     Celles qui promettent et qui ne viennent pas.
     Celles qui conseillent d'un air suffisant et celles qui rouspètent car on ne leur réponds pas assez vite au téléphone.
     Celles qui nous prennent pour un organisme public d'information, à leur service, sans savoir comment nous vivons financièrement. Celles avec qui j'ai travaillé à mettre beaucoup de choses en route pour les sages-femmes et qui ne disent jamais avec qui elles l'ont fait. Celles qui ont utilisé mes mots et mes idées sans citer leur source.
     Il ya eu aussi les nuits et les jours passés à gérer, dans le bénévolat le plus complet, toute la structure interne de l'association, les programmes de formation, les congrès, les voyages d'études etc ...

20 ans à SAGES-FEMMES DU MONDE m'auront permis de rencontrer, pas mal d'égoisme et un manque certain d'imagination dans la corporation des sages-femmes, que ce soit individuellement ou à travers leurs organismes représentatifs, plus conservateurs que groupes dynamiques de conscientisation, de propositions et de pression.

     J'ai aussi rencontré les gestionnaires politiques, des députés, des ministres, généreux en promesses et interessés seulement lors des campagnes électorales. Et des journalistes parisiens parlant de la naissance à travers leur propre expérience d'accouchement périduralisé avec leur obstétricien plutôt connu dans quelque clinique plutôt huppée.

J.L.G. : C'est un peu triste tout cela!

P.J.B. : Non c'est vrai et c'est la vie. Tu me demandes ce que je n'ai jamais dit. Je dis ! Je pourrais d'ailleurs, encore citer des anecdotes et des faits avec des noms. Mais cette partie là, un peu sombre de toute vie associative, est peu importante par rapport à ce que m'a apporté la gestion de SAGES-FEMMES DU MONDE et maintenant SAGES-FEMMES International.
     J'ai appris les relations humaines, les cultures différentes, le management, et cela a bien enrichi ma vie.
     J'ai appris l'écoute de l'essentiel et l'importance de ne pas se fier aux apparences.
     J'ai bénéficié de magnifiques accueils de collègues sagesfemmes, notamment au Burkina Faso et au Maroc.
     J'ai admiré (et admire encore) la ténacité des sagesfemmes du Québec pour exister comme sages-femmes au service des mères.
     J'ai apprécié la passion d'Astrid Limburg, sage-femme des Pays Bas, pour la naissance physiologique.
     J'ai ... j'ai ... je ne puis citer dans le détail ce que j'ai vécu depuis 20 ans. Mais c'est une grande richesse que je n'oublie pas. Que toutes les personnes que j'ai rencontrées ne l'oublient pas non plus.

J,LG. : En fait c'était plus facile d'être sage-femme du monde que sage-femme de France?

P.J,B. : Cela peut être dit de cette manière. Ce n'est pas plus facile, c'est plus enrichissant. On multiplie par 10, 20, 30 (selon le nombre de pays) la possiblité de rencontrer quelques sages-femmes authentiques et cela fait une grande équipe. En restant seulement cantonnée sur la France, j'aurais très rapidement été limitée et j'aurais peut-être changé de métier. Car être sage-femme pour moi, c'est remplir la globalité de sa profession: humaine d'abord avec la protection de la physiologie obstétricale et technique ensuite pour travailler en prévention, dans le dépistage et le traitement des risques obstétricaux.

J,L.G, : Comment va être maintenant organisé SAGESFEMMES International?

PJB.: A ce jour, nous avons rempli tous nos objectifs (voir le chapitre « Historique de l'association ») y compris la création de la revue « SAGES-FEMMES International ».

J.L.G. : La revue, c'est une belle réussite. Comment va-t-elle évoluer?

P.J.B. : On sait bien que pour toute revue, la première année est un test. Dans cette première année, je peux remarquer plusieurs choses:

- c'est un travail très prenant et très interessant que de publier une revue. A notre époque, il faut trouver un bon éditeur et une bonne régie publicitaire. Ce qui n'est pas évident,

- nous avons reçu beaucoup d'articles de la part des sagesfemmes et nous possédons une banque de données qui nous permet de publier une revue pendant des années,

- nous avons reçu de nombreuses lettres d'encouragements à faire une revue par les sages-femmes et pour les sages-femmes,

- nous avons besoin de faire des ajustements avec l'éditeur, Monsieur Ambrosini de la la société Médialogues afin que la revue soit le reflet de ce que nous voulons et qu'elle paraisse longtemps,

- si les abonnements sont le reflet de votre satisfaction, nous devrions en recevoir beaucoup. Or tel n'est pas le cas. Nous avons besoin de plus d'abonnements. Cela dépend de vous si vous désirez continuer à soutenir la publication d'une revue ouverte, agréable faite par les sages-femmes et pour les sages-femmes.

Bien sincèrement, je ne sais pas comment la revue va évoluer. Mais déjà, d'avoir pu en faire une, c'était un challenge qui est devenu réalité.

J.L.G. Est-ce que tu te vois encore longtemps à la gestion de l'association?

P.J.B. : Ce n'est pas que je me vois ou pas. C'est, est-ce que j'ai rempli mon temps ? Je pense que j'ai rempli mon temps. Depuis plusieurs années, je rappelle que à partir de 1995, je ne garderai que peu d'activités dans le sein de l'association, seulement l'organisation de voyages d'études et la gestion de la revue. Tout le reste, sera repris par des sages-femmes ou s'arrêtera. Il n'y aura aucun regret de ma part. Les choses et les gens font leur temps et c'est à d'autres de reprendre le flambeau. Ou alors d'autres activités nouvelles se mettent en place et qui correspondent plus à leur temps.

J.L.G. : Et si d'autres sages-femmes ne viennent pas prendre la relève à SAGES-FEMMES International?

P.J.B. : Tant pis pour elles et pour la profession. C'est une structure de la profession qui peut les aider. Peut-être aussi, SAGES-FEMMES International aura fait son temps et elles mettront en place d'autres structures plus adaptées aux temps futurs. J'ai trop souffert de la main mise des "anciennes sages-femmes"  sur la profession - lorsque j'étais jeune sage-femme - pour refaire la même chose.

J.L.G. : Que vas-tu faire maintenant?

P.J.B. : D'abord, ça fait 40 ans que je travaille. Alors il est bien normal que je décroche un peu de mes nombreuses activités pour avoir le temps d'apprécier la mer, la lecture et la musique

     Je veux me consacrer au travail très interessant que je fais actuellement pour les quelques années qui me restent avant ma cessation d'activité professionnelle. C'est le management de la maternité Pasteur à Royan où je peux mettre, plus ou moins, en pratique les principes du Management Obstétrical. A la maternité Pasteur, j'essaye de faire pour les clientes, avec les medecins et le personnel « Une maternité pour bien vivre ». (CF chapitre INFOS, INFOS).

 J.L.G. : Si tu devais en quelques mots résumer ta participation à l'association SAGES-FEMMES international que dirais-tu ?

P.J.B. : Je dirai, communication, partenariat, échanges, savoir, savoir être, savoir faire, soutiens, coups bas, nuits blanches, épuisement, fierté, pas de regrets, enfin pour résumer: mission accomplie. MERCI


Note de J.Bessonart

     Nous sommes en 2009 - cet article a été écrit en 1995.
     Depuis 2001 j'ai pris ma retraite professionnelle confiant l'association SAGES-FEMMES International aux sages-femmes en activité et en contact avec l'association. Certaines ont montré un intérêt pour reprendfre le concept de SAGES-FEMMES DU MONDE mais...........
SANS SUITE !!!!! Je n'en connais pas les raisons.
     Mais, compte tenu de la vie plus difficile et de "la crise" j'observe qu'il y a un repli certain sur son pays, sa région, sa ville, son quartier... et une baise de l'intérêt des sages-femmes au niveau international.



12/07/2009
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